mercredi 22 octobre 2008

Aquino, Tripp, & Bies 2006

Karl Aquino, Thomas M. Tripp, Robert J. Bies. 2006

Getting Even or Moving On?

Power, Procedural Justice, and Types of Offense as Predictors of Revenge, Forgiveness, Reconciliation, and Avoidance in Organizations.

Journal of Applied Psychology, Vol. 91, No. 3, 653–668

Une étude sur terrain et une étude expérimentale ont examiné le lien entre des variables organisationnelles et différentes réponses des victimes au mauvais traitement perçu. Les deux recherches ont montré qu’un climat de justice procédurale modère l’effet des variables organisationnelles sur les comportements de vengeance, pardon, réconciliation ou évitement de la par de la victime.

Dans l’étude n°1 il a été montré que, le statut hiérarchique absolu (absolute hierarchical status) met en valeur le pardon et la réconciliation mais seulement lorsque les perceptions d’un climat de justice procédurale étaient élevées. Le statut hiérarchique relatif (relative hierarchical status) augmentait la vengeance, mais seulement lorsque les perceptions d’un climat de justice procédurale étaient faibles.

L’étude n°2, un examen de laboratoire, a montré que les victimes étaient moins enclines à approuver la vengeance ou l’évitement suivant le type de mauvais traitement, mais seulement lorsque les perceptions d’un climat de justice procédurale étaient élevées.

Background théorique

Grand nombre d’études empiriques ont examine comment les individus réagissent à la perception d’injustice où aux offenses interpersonnelles dans les organisations. Grand nombre de ces études se sont focalisées sur la vengeance ou d’autres types de comportements agressifs (exp. Aquino, Tripp, & Bies, 2001; Bies & Tripp, 1996; Bradfield & Aquino, 1999; Skarlicki & Folger, 1997; Skarlicki, Folger, & Tesluk, 1999; Tripp & Bies,1997). Toutefois, les employés se sentant maltraité (wronged) ne vont pas tous vouloir se venger. Des fois les gens cherchent des réponses non agressives comme le pardon ou la réconciliation (Bradfield & Aquino, 1999; McCullough, Worthington, & Rachal, 1997; McCullough et al., 1998). Relativement à la vengeance, le pardon et la réconciliation ont reçu peu d’attention de la part des chercheurs.

La question importante à se poser est : Que font les employés lorsqu’ils sont offensés et pourquoi ils le font

En répondant à cette question les managers seront mieux équipés pour maîtriser les réponses des victimes au mauvais traitement et donc préserver la paix, la justice et la productivité à l’intérieur de l’organisation.

Des etudes antérieures ont identifié les facteurs psychologiques comme pouvant motiver différentes réponses aux offenses sur le lieu de travail. Des exemples de ces variables incluent : l’attribution du blâme (Bradfield & Aquino, 1999; Weiner, 1995), les dynamiques socio-cognitives (social– cognitive dynamics : Bies, Tripp, & Kramer, 1997), la personnalité (Emmons, 2000), « empathetic emotions » (McCullough et al., 1997, 1998), et « the sophistication of an individual’s moral reasoning » (Enright, Santos, & Al-Mabuk, 1989).

Il y a peu d’études empiriques sur les facteurs organisationnels influençant la vengeance, le pardon et la réconciliation.

Les facteurs organisationnels doivent être pris en considération si les chercheurs veulent comprendre pleinement comment les émotions négatives générées par les offenses sur le lieu de travail donnent lieu à des résultats aussi bien positifs que négatifs.

La réponses que les auteurs se sont posés dans cet article est de savoir quels sont les forces qui -sur le lieu de travail de la victime et qu’une organisation ou un manager pris individuellement peut contrôler- peuvent affecter les choix de la victime concernant sa réponse défensive (coping response) ? Deux études ont été menées pour essayer de répondre à cette question.

Study 1: The Effect of Power and Procedural Justice Climate

Le but de la première étude était d’examiner trois facteurs organisationnels pouvant Façonner/ modeler (shape) les réponses au mal (harm) ou mauvais traitement sur le lieu de travail : statut hiérarchique absolu de la victime (absolute hierarchical status), statut hiérarchique relatif de la victime (relative hierarchical status) et le climat de justice procédurale.

Ces trois variables ont été choisies par les auteurs parce que les recherches antérieures (exp. Aquino et al., 2001) ont montré qu’elles influencent la vengeance. Ils ont voulu tester si ces résultats d’étendent au pardon et à la réconciliation.

En outre les recherches antérieures ont montré que des actes spécifiques d’injustice peuvent motiver la vengeance (Bies & Tripp, 1996; Skarlicki & Folger, 1997), il s’agit dans cette étude de voir si ces résultats s’étendent également au climat de justice procédurale. Ce qui est nouveau dans cet article c’est qu’au lieu d’observer comment les différentes offenses sur le lieu de travail sont perçues comme injustes -ce qu’on fait plusieurs autres études- il s’intéresse à la manière dont l’observation du climat de justice peut affecter la compréhension des employés de la manière avec laquelle ils doivent réagir aux offenses qui se sont déjà déroulées sur le lieu de travail. Plus particulièrement : étudier comment le climat de justice procédurale atténue ou amplifie les effets du statut hiérarchique relatif, du statut hiérarchique absolu sur la vengeance, le pardon et la réconciliation.

Revenge, Forgiveness, and Reconciliation: Responses to Workplace Offense

La vengeance, le pardon et la réconciliation sont traités comme des stratégies de défense (coping stratégies) pour s’en prendre avec (deal with) les offenses au travail. Ces réponses aident la victime à gérer les émotions et cognitions négatives générées par l’offense.

La vengeance est définie par les auteurs comme “an effort by the victim of harm to inflict damage, injury, discomfort, or punishment on the party judged responsible for causing the harm” (Aquino et al., 2001; Stuckless & Goranson, 1992).

Le pardon est une réponse complexe qui a été conceptualise comme étant un événement à la fois intra- et interpersonnel (Baumeister, Exline, & Sommer, 1998).

Enright et ses collègues (Enright & the Human Development Study Group, 1991, p. 108) se sont focalises sur son aspect intra-personnel en le définissant comme étant “a willingness to abandon one’s right to resentment, condemnation, and subtle revenge toward the offender who acts unjustly while fostering the undeserved qualities of compassion generosity or even love toward him/her.”

McCullough et ses collègues (1997, pp. 321–322) définissent le pardon comme étant “the set of motivational changes whereby one becomes decreasingly motivated to retaliate against the offending partner, decreasingly motivated to maintain estrangement from the offender, and increasingly motivated by conciliation and goodwill toward the offender despite the offender’s hurtful actions”.

Dans cet article les auteurs différencient entre les aspects intra-personnels et inter-personnels du pardon qui sont soulignés par des auteurs définissant le pardon comme étant « the internal act of relinquishing anger, resentment, and the desire to seek revenge against the offender (e.g., Enright & the Human Development Study Group, 1991; North, 1987). L’aspect interpersonnel du pardon sera désigné par le terme réconciliation que les auteurs définit par les auteurs comme étant ” an effort by the victim to extend acts of goodwill toward the offender in the hope of restoring the relationship” (McCullough et al., 1997, 1998).

Ces deux construits ont été différenciés parce que les auteurs pensent qu’ils ne sont pas synonymes : il est possible de surmonter une émotion négative sans pour étant essayer de restaurer la relation avec l’offenseur.

Power and Status

L’argument de base retenu par les auteurs est les victimes ne vont pas chercher la vengeance lorsque les dynamiques de pouvoir de la situation rendent le coût de l’action trop élevé (contre-vengeance (counterretaliation) d’un supérieur, considération –par les pairs- de la vengeance comme un abus de pouvoir.

Deux dimensions du pouvoir seront prises en considération. Elles ont été identifiées par les recherches théoriques et empiriques antérieures comme conséquentes dans le processus de réponse à l’offense au travail.

- Le statut formel de la victime relativement à son offenseur (Bies & Tripp, 1996; Heider, 1958; Kim, Smith, & Brigham, 1998) ; désigné dans l’article par le statut hiérarchique relatif.

- La position hiérarchique absolue de la victime dans l’organisation (Aquino et al., 2001) ; désignée dans l’article par le statut hiérarchique absolu.

Procedural Justice Climate

Les procédures formelles sont les principaux mécanismes par lesquels les organisations font passer des résultats justes (just outcomes) et fournissent une réparation aux victimes d’injustice au travail. Les expériences courantes de respect pour ces procédures peuvent créer des perceptions d’un climat de justice procédurale (Colquitt, Noe, & Jackson, 2002; Naumann & Bennett, 2000).

Les recherches antérieures par Skarlicki et ses collègues (Skarlicki & Folger, 1997; Skarlicki et al., 1999) ont montré que les perceptions de justice procédurale en ce qui concerne un acte ou événement spécifique sont négativement associées à la vengeance. Les auteurs considèrent que ces résultats s’étendent au climat de justice procédurale.

Ces prédictions sont basées sur une vision fonctionnelle des procédures qui implique que, lorsque les managers mettent en œuvre les procédures d’une manière juste, les employés doivent penser que leurs intérêts sont protégés par l’organisation. Cependant, lorsque les procédures sont perçues comme injustes, la confiance des employés dans les procédures comme mécanismes de restitution de la justice baisse. Modèle instrumental de la justice (Thibaut & Walker, 1975).

Study 2: The Effect of Offense Types and Procedural Justice Climate

Les études antérieures ont montré que les gens croient que les offensent sévères exigent des réponses sévères (Tripp, Bies, & Aquino, 2002). Mais comment peut le type de l’offense et non seulement sa sévérité influencer la préférence de la victime pour une réponse particulière.

Par exemple, est ce que cela importe si l’offense et une insulte personnelle ou un acte qui nuit aux chances d’un employé d’être promu ? Les auteurs postulent que ça importe et croient que la théorie de la justice peut expliquer pourquoi certains types d’offenses peuvent susciter des réponses différentes d’une victime plutôt que d’autres réponses.

Dans l’étude n°2, les auteurs se sont focalisés sur 2 des 3 réponses examinées dans l’étude n°1 -la vengeance et la réconciliation- parce qu’ils voulaient voir comment les types d’offenses peuvent influencer les comportements interpersonnels d’une façon qui peut aussi bien intensifier que dés-intensifier le conflit. Les auteurs ont également examiné une réponse interpersonnelle qui n’a pas été mesurée dans l’étude n°1, il s’agit du retrait de la relation avec son offenseur. McCoullough et al. (1997) parlent de cette réponse sous le nom d’évitement. Les auteurs examinent cette réponse pour étudier un autre aspect du pardon comme défini par McCoullough et ses collègues (1997), à savoir, que la victime est moins motivée à entretenir l’éloignement par rapport à l’offenseur.

(…)

Procédure

Un questionnaire a été administré. La participation était volontaire et tous les participants ont été assurés de l’anonymat de leurs réponses. Les employés qui ont accepté de participer ont terminé le questionnaire à temps durant les horaires de travail. Tous les questionnaires ont été administrés et retournés directement à l’un des chercheurs ou à un assistant chercheur gradué (graduate).

Mesures

La méthode des incidents critiques a été utilisée pour obtenir des expériences d’offenses sur le lieu de travail. Il a été demandé aux participants de répondre à la question suivante :

Passez en revue les 6 derniers mois en tant qu’employé au service public pour essayer de vous rappeler d’un incident où une autre personne vous a offensé. Rédigez, SVP, 2 ou 3 phrases ou décrire ladite offense. Si vous n’avez pas été offensé par une autre personne durant les six derniers mois, pensez à la dernière fois à laquelle vous avez été offensé par une autre personne dans le service public ou un autre département (dans le gouvernement municipal)

Après avoir décrit l’offense, les participants ont répondu à une série de questions à propos de leurs réponses cognitives et comportementales.

Etude n° 2

Echantillon

148 étudiants en MBA appartenant à deux universités ont complété le questionnaire. 57% étaient des hommes, moyenne d’âge 29,1 ans et moyenne d’expérience professionnelle 7,7 ans.

Procédure

Il a été demandé aux répondants de lire une histoire d’une demi page à propos d’un conflit entre deux co-travailleurs. L’histoire contenait des informations concernant le type de l’offense et le climat de justice procédurale. Les participants ont ensuite répondu à un questionnaire de 85 items qui mesurait leurs perceptions du conflit, de la façon dont ils pensent que la victime va réagir et des données démographiques.

Les variables indépendantes

Les variables indépendantes ont été manipulées en changeant l’information dans l’histoire du conflit. L’histoire de base se lit comme suit :

« Par et Val sont ingénieurs au département ingéniorat à AudioBit, une entreprise de 500 employés qui produit des cartes audio pour PC. AudioBit opère dans les affaires depuis 10 ans, Pat et Val y travaillent depuis cinq ans. Le manager de AudioBit est réputé non seulement pour la fabrication de produits de bonne qualité mais aussi pour le climat de justice organisationnelle [information manipulée par les auteurs à ce niveau : High - Low].

La dernière semaine Par et Val ont discuté leur intérêt mutuel pour travailler sur une mission hautement désirée qui concerne la conception d’un nouvel algorithme de compression. Cependant, un seul employé supplémentaire était nécessaire pour travailler sur cette mission. Val voulait désespéramment participer à cette mission.

Le directeur de projet voulait interviewer un petit groupe de personnes [manipulation du type de l’offense à ce niveau : GoalRule - Derogation]. A la fin, un troisième employé, Kelly, a eu la mission.


Les références complètes aux travaux cités dans ce texte sont ici

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